Les douleurs du
membre fantôme
Vous trouverez ici des informations générales sur les douleurs liées à l’amputation et des informations parues dans la presse spécialisée.
D’après une communication de E. Muller, Strasbourg.
Qu’est-ce que le membre fantôme et la douleur fantôme ?
Les différentes manifestations
Le membre fantôme ou « hallucinose »
C’est la persistance de la partie du corps amputée ou « membre fantôme ».
Les sensations intéroceptives (qui viennent de l’intérieur du corps), sensations kinesthésiques et sensations de mouvement sont fréquentes. La position du fantôme est, initialement du moins, identique à celle qu’occupait le membre juste avant l’interruption des influx, à condition que le malade ait été, à cet instant, conscient.
Les sensations extéroceptives sont plus rares.
La douleur du fantôme ou « algohallucinose »
Elle correspond à des douleurs ressenties dans le membre fantôme. Elle affecte 72 % des patients en postopératoire immédiat, avec une persistance au long cours chez la moitié d’entre eux. Il existe deux variétés de douleurs: celles qui sont identiques aux douleurs préopératoires, et les autres, qui constituent la majorité des manifestations de « l’algohallucinose ».
Leur fréquence croît avec l’âge, avec la sévérité des douleurs préopératoires, la brutalité de l’amputation. Les douleurs sont distales, (brûlures, douleurs neurologiques, crampes, contractures, décharges électriques). Elles ne sont pas constantes, formant un fond douloureux avec des accès paroxystiques spontanés ou provoqués par des facteurs extérieurs.
Les douleurs du moignon
Les douleurs du moignon, conséquences directes de l’amputation, sont fréquentes. Elles sont liées soit à une pathologie locale du moignon décelable à l’examen clinique, soit en rapport avec la section de filets nerveux.
Un « névrome » (excroissance d’un nerf), dont la palpation déclenche une douleur fulgurante, peut nécessiter un geste chirurgical. Des douleurs de type neuropathique signent une atteinte des petits filets nerveux. Elles peuvent être soulagées par une infiltration d’anesthésique local.
Les facteurs favorisants
- L’intensité et la durée des douleurs avant l’amputation.
- Une technique chirurgicale incorrecte.
- Les conditions climatiques. Comme pour toutes les autres douleurs, les conditions de température, de pression et d’humidité influencent le seuil de perception des douleurs d’amputation.
- Le stress et la fatigue.
- La consommation d’alcool.
- La mauvaise acceptation psychologique de l’amputation.
- L’inactivité et l’immobilité prolongée (la position assise prolongée lors du travail de bureau est à éviter).
- Les différentes maladies, mêmes banales (grippes, angines, rhino-pharyngites, infections virales, gastro-entérites, etc.), augmentent les sensations de membre fantôme et les rendent parfois insupportables.
Conseils pour limiter les douleurs
À titre préventif
Il s’agit de favoriser la circulation sanguine dans le moignon : exercice physique régulier, marche, cyclisme.
On peut aussi faire des massages réguliers et de la relaxation.
À titre curatif
Ces quelques conseils peuvent être utiles:
- Envelopper le moignon dans une serviette éponge chaude pour activer la circulation.
- Exercice physique modéré du moignon.
- Masser soi-même le moignon ou, mieux, demander à quelqu’un de le faire.
- Changer de position. Si vous êtes assis, levez-vous pour faire circuler le sang.
- Prendre un bain ou une douche chaude.
- Si la douleur est présente lors du port de la prothèse, la retirer, ôter le manchon ou le silicone, et la remettre après quelques minutes. La modification même légère des points d’appui peut suffire à soulager.
- Lorsque les douleurs se répètent fréquemment, noter les horaires ou les circonstances de survenue. Cela aide le médecin pour le traitement.
- Masser les muscles du moignon et relâcher doucement la pression.
Certains centres de réadaptation utilisent aussi le TENS (Transcutaneous Electrical Nerve Simulator, soit simulateur électrique transcutané). Par l’intermédiaire d’une ou deux paires d’électrodes collées sur la peau, le TENS délivre des impulsions électriques indolores et de faible intensité sur une zone douloureuse ou sur le trajet d’un nerf. Ces impulsions électriques activent des fibres nerveuses rapides, de plus gros calibre que celles qui véhiculent la douleur. Le premier arrivé est le premier servi. Le message perçu par le cerveau est celui des fourmillements délivrés par le TENS, et il masque ainsi la douleur.
L’utilisation du TENS à la maison peut se faire sur prescription du médecin : l’appareil se loue ou s’achète. Renseignez-vous sur les modalités de prise en charge par l’assurance maladie.
Traitements médicamenteux
Ces conseils ne remplacent pas une consultation chez le médecin si nécessaire.
- Antalgiques de niveau 1
Ce sont les seuls à pouvoir être utilisés en auto-prescription. Il s’agit en pratique du paracétamol sous toutes ses formes. - Antalgiques de niveau 2
Ils ne sont délivrés que sur prescription médicale, même s’ils font fréquemment partie de la pharmacie familiale (codéine, tramadol, dérivés de l’opium) : attention à la dépendance. - Traitements relevant d’une prise en charge spécialisée
(à titre indicatif)- les antidépresseurs tricycliques
- les antiépileptiques sont utiles sur les douleurs à composante fulgurante (décharges électriques).
Autres traitements médicaux
Les agents physiques tels que acupuncture, infiltration des névromes ou reprise chirurgicale du moignon ont leurs indications propres.
La TMR (Targeted Muscle Reinnervation, en anglais)
La TMR, ou réinnervation musculaire ciblée, est une intervention chirurgicale utilisée à l’origine pour améliorer le contrôle de prothèses de membres supérieurs. Les nerfs coupés sont chirurgicalement réorientés vers les muscles restants. Ils se développent ensuite dans le nouveau tissu musculaire.
La TMR s’est montrée très efficace pour restreindre les douleurs du membre fantôme, et même quelquefois les faire disparaître.
Thérapies alternatives
La thérapie du miroir
La thérapie du miroir est une thérapie connue dans l’approche de la douleur. Les deux membres sont placés de part et d’autre d’un miroir et le segment amputé est caché de la vision. La personne observe l’image d’un membre entier dans le miroir et a l’illusion de voir son membre bouger. L’apparition et la gestion de la douleur font appel au système nerveux central. Or, le cerveau évolue en permanence. Le cerveau est ainsi entraîné à fonctionner différemment par l’intermédiaire de la vision.
Les limites mises en avant sont la nécessité d’être amputé en unilatéral, mais aussi la non persistance des bienfaits une fois le miroir enlevé.
Grâce à l’évolution de la technologie informatique, il est possible aujourd’hui d’utiliser une thérapie miroir virtuelle 3D (casques ou écrans). Ces méthodes sont en plein développement et prometteuses d’efficacité.
Autres thérapies
D’autres thérapies font également l’objet de recherches : hypnose, ostéopathie, yoga, cannabis thérapeutique. Leur efficacité scientifique n’est pas démontrée, mais des patients ont été soulagés. Elles méritent d’être approfondies du point de vue expérimental.
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